On nous demande souvent pourquoi tel ou tel film n’arrive jamais sur les écrans belges. La réponse nécessite quelques explications mais le principe est simple et désolant à la fois : de septième art qu’il était, le cinéma est dans bien des cas devenu une simple "une marchandise". Chaque film est donc un produit périssable, dont la production et la diffusion dépendra du goût du jour. Tandis qu’un réalisateur dépendra le plus souvent du bon-vouloir d’un producteur, qui recherchera un vendeur, lequel convaincra (ou non) un distributeur, qui lui-même se décidera en fonction de sa capacité à trouver des sallesŠ Le distributeur se chargera du tirage des copies et de la promotion, tandis que la salle mettra les films à l’affiche mais pourra les en ôter dès que leur fréquentation sera jugée insuffisante.
A moins d’être riche ou de faire le choix d’un travail artisanal, un cinéaste n’aura donc rien à dire sur la diffusion de son film : à n’importe quel stade de la chaîne, celle-ci pourra être bloquée par un rachat, une faillite, l’entêtement d’un vendeur à demander des prix exorbitants, ou encore la vente par "packages" ("je te donne celui-là si tu me prends ceux-là") mettant des œuvres dans les mains de distributeurs qui n’en veulent pas...
Quid des aides publiques ? Si l’Union européenne et nombre de ses états membres octroient des aides plus ou moins conséquentes à la production et à la distribution, c’est essentiellement dans le cadre de politiques industrielles et non culturelles. Les aides européennes recèlent d’ailleurs d’effets pervers, comme l’uniformisation des programmations dites "d’art et essai", ou encore le financement de certaines sociétés de distribution qui massacrent littéralement la vie des films.
Et le Nova, là-dedans ? Ce qui le différencie d’autres cinémas ne tient pas seulement dans le choix et la manière de programmer des films. La plupart du temps, les copies dégottées par son équipe (bénévole !) proviennent de distributeurs à l’étranger ... d’où l’absence fréquente de sous-titres bilingues. Et les frais de location sont doublés du versement de droits d’auteurs, des frais de transport et de promotion... Au milieu de tout ça, la nature non-marchande d’un projet comme le Nova lui confère donc le statut de véritable petit OVNI.
Cherchant à rompre avec un certain consumérisme culturel, le Nova est souvent tenté par les programmations thématiques et est souvent pris d’une boulimie de films, tout en ne leur offrant paradoxalement que peu d’occasions d’être vus. Néanmoins, le Nova se met parfois à ressembler un peu plus aux autres cinémas en offrant son écran pour une longue période à certains films n’ayant pas eus la chance d’une distribution en Belgique. Rappelez-vous de "Careful", "Conspirators of Pleasure", "L’impitoyable lune de miel", "Pas vu pas pris", "Singapore Sling", "Kto Bolche", "Sicilia !"... D’avril à juin, place à "La route", "Julien Donkey-Boy" et "Wagner".