De tout temps, le fou a reçu toute une série de dénominations parfois tendres, parfois méfiantes, parfois plus "scientifiques". Les maboule, gaga, fada et kuku (islandais), djoumdjoum, zinzin, loufdingue, marteau, agité du bocal, givré de la toiture, analysant, idiot du village, dérangé sont encore sympathiques. D’autres sont plus savantes et enferment celui qui souffre dans une catégorie de laquelle il semble difficile de sortir : débile, schizophrène, psychotique, pervers, autiste, hystérique, neurasthénique, maniaque, dépressif, hébété, catatonique, voire épileptique. Par contre, certains termes sont carrément injurieux, comme taré, attardé, arriéré mental, anormal, demeuré, psychiatrisé, colloqué, mongol ...
Depuis sa naissance, le cinéma s’est beaucoup intéressé à la figure du fou. Bon nombre de films présentés au cinéma Nova en collaboration avec L’Autre Lieu et Psymages sont des portraits de personnes comme vous et moi, des hommes et des femmes parmi lesquels il est parfois difficile de distinguer les "délirants" des "normaux". Ce n’est pas innocent. Il s’agit de réhabiliter la personne en tant qu’être unique et communiquant avec ses semblables, de la défendre contre l’institution, souvent aliénante, qu’est l’hôpital psychiatrique.
Quatre parties nous ont permis de mieux cerner le thème de la psychiatrie et ses alternatives, sans toutefois composer un catalogue exhaustif.
La première consiste à envisager la psychiatrie elle-même de façon à en percevoir les travers pour ensuite mieux cerner tout l’apport de l’antipsychiatrie. Nous avons voulu voir, dans la seconde, quelles étaient les différentes alternatives à la psychiatrie. Des expériences différentes existent parfois depuis la nuit des temps et sont le fait de personnes peut-être plus tolérantes, de professionnels comme d’anciens usagers de la psychiatrie. Dans la troisième, d’autres courants parfois présents au sein des institutions psychiatriques semblent aussi être des formes d’alternatives à la psychiatrie. L’art-thérapie pratiquée dans des conditions d’écoute suffisantes et non d’interprétation psychologisante permet d’envisager la personne qui souffre comme un artiste et non comme un patient. Hormis la journée des ateliers vidéos organisée par Psymages, deux soirées avec invités seront consacrées aux différentes tendances de l’art-thérapie. Des expositions et un concert viendront compléter les films qui abordent l’art en relation étroite avec la folie. Enfin, quatrième section, l’ethnothérapie, quand elle considère la souffrance psychique de personnes immigrées selon les coutumes et croyances du pays d’origine, constitue également une voie "autre". Les rituels de "dépossesion" africains ont un caractère thérapeutique et inspirent aujourd’hui les ethnopsychiatres. Une soirée suivie d’un concert gnawa sera dédiée à trois de ces cérémonies africaines.
Certains réalisateurs de films quelquefois très rares viendront témoigner de ces différentes approches qui, toutes, ont voulu porter un regard autre sur l’asile et ses fous. Pourquoi les cinéastes ont-ils été si massivement attirés par la représentation de la folie ? C’est ce que cette programmation tente (modestement) de réfléchir. Parce que le fou a plus à nous apprendre que lui de nous !