A la fin des années ’60 en Amérique, sous la présidence de Richard Nixon, une poignée d’étudiants révoltés par la guerre du Vietnam et par l’oppression des minorités se formèrent un mouvement révolutionnaire armé ayant pour but de renverser le gouvernement. Ils se baptisèrent les "Weathermen", s’inspirant d’une chanson de Bob Dylan, "Subterranean Homesick Bluese", qui dit : "You don’t need a weatherman to know which way the wind blows" ("Vous n’avez pas besoin d’un météorologue pour savoir d’où vient le vent").
Leur lutte fut marquée par de nombreux attentats, notamment contre le Capitole, le Pentagone, le Département d’Etat, et des agences du FBI. Dans leurs moments les plus médiatiques, le "Weather Underground" (autre nom du mouvement) fut très critiqué : le public était choqué par la violence du groupe et de nombreux militants de gauche considéraient qu’il contribuait plus à discréditer la gauche qu’à servir ses objectifs. Agissant dans la clandestinité et échappant au FBI pendant presque 10 ans, les "Weathermen" devinrent des personnages à la Bonnie and Clyde.
Trente ans plus tard, leur histoire a été oubliée. La plupart des anciens membres du groupe mènent des vies "normales" : sauvés par les nombreux abus de procédure commis par le FBI au cours de sa traque, ils n’ont pas purgés de peines de prison.
Plusieurs d’entre eux et elles, aujourd’hui âgés de 50 ans et plus, retracent ici très méticuleusement les réflexions et les indignations qui les ont conduit au terrorisme et à la clandestinité. Ce film leur permet de s’exprimer devant une caméra, afin de partager leur parcours personnel et leur point de vue sur ce que les mouvements de paix signifiaient pour eux à l’époque. Dans quelle mesure la violence fut-elle utile à leur cause ? En quoi les a-t-elle changé ? Que pensent-ils de leurs actions trente ans après ?
Avec un luxe d’archives et une palette d’entretiens passionnants avec ces ex-militants, le documentaire relate la création en 1969 puis l’histoire des Weathermen, devenus depuis lors une légende vivante pour les jeunes contestataires américains et les hérauts de la contre-culture des années ’70 : de Timothy Leary, le pape du LSD que l’organisation fit évader, à Jerry Rubin - dont le titre du livre "We are Everywhere" se réfère à une phrase de Bernardine Dohrn, pasionaria du mouvement.
Qu’est-ce qu’une véritable justice sociale en Amérique et dans le monde ?
Persuadés que la véritable histoire du "Weather Underground" est complexe et moralement ambiguë, les deux réalisateur (Sam Green, dont le premier film "The Rainbow Man" a déjà été montré au Nova, et Bill Siegel, qui a notamment co-réalisé un documentaire sur Muhammad Ali) ont choisi de rouvrir cette page de l’histoire récente des Etats-Unis alors que nous sommes en pleine période de "guerre au terrorisme". Les questions qu’ils soulèvent résonnent d’une étonnante actualité.
Car si leur film, primé et nomminé dans de nombreux festivals, se regarde comme un thriller, il pose avant tout beaucoup de questions au spectateur. Des questions qui contrecarrent le manichéisme ambiant du "bien" et du "mal", du "bon" et du "mauvais", et qui nous renvoient à la complexité humaine et à la nature subjective de la morale ambiante.